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La Cour de cassation condamne la CIPAV pour minoration des droits à la retraite


Le 23 janvier dernier, la Cour de cassation a confirmé le jugement et l’arrêt d’appel rendus dans une affaire de droits à la retraite pour les assurés inscrits à la CIPAV en tant qu’auto-entrepreneur.


Au moment de liquider ses droits à la retraite, un assuré, qui a exercé une activité libérale de 2010 à 2014, sous le statut d’auto-entrepreneur, s’est aperçu que ses droits étaient minorés par la caisse de retraite auprès de laquelle il cotisait.


A cette date, son décompte de point n’était que de 68 points au lieu de 192 points. Pour la CIPAV « le montant des pensions de retraite doit nécessairement être proportionnel aux cotisations versées ». Selon elle, cela résulte du caractère contributif du système de retraite français dans lequel les retraités perçoivent une pension proportionnelle à leur contribution au système.

Cotisations CIPAV

Pour bien comprendre le problème dans cette affaire, il convient d’analyser le régime de retraite de la CIPAV dans lequel les cotisations sont appelées selon les revenus nets non-salariés du chef d’entreprise. Il existe 8 classes de cotisations possibles.


Les libéraux ayant un salaire faible peuvent demander une réduction de ces cotisations, mais par conséquent, ils obtiendront moins de points de retraite complémentaire.


Pour rendre attractif le dispositif de la micro-entreprise, les micro-entrepreneurs (anciens auto-entrepreneurs) sont assujettis à une cotisation sociale forfaitaire de 22%.

Le principe d’égalité entre les auto-entrepreneurs et les autres libéraux

Le gouvernement a mis en place en 2008 une politique visant à encourager l’entreprenariat en créant le régime des auto-entrepreneurs. Le régime micro social prévu par la loi est un régime simplifié de calcul et de règlement des cotisations, ce dernier devant être calculé sur le chiffre d’affaires. Cependant, pour inciter les gens à travailler sous ce régime, l’Etat a promis une égalité de traitement entre les auto-entrepreneurs et les autres indépendants, à savoir des cotisations moindres mais des droits à la retraite équivalents. En ce sens, la loi a prévu le versement des compensations de l’Etat à la CIPAV pour couvrir la différence de cotisations.

Cette compensation s’effectue dans des conditions assurant une cotisation « au moins égale à la plus faible cotisation non nulle dont ils pourraient être redevables ».

Or, la CIPAV a retenu comme référence, la « cotisation réduite » prévue pour les professionnels ayant de faibles revenus et non pas la classe A du premier tableau, comme prévu par la loi.


Pensant à juste titre être dans ses droits, l’assuré saisit la commission de recours amiable de ladite caisse et enfin l’ancien Tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS).

Par jugement en date du 29 décembre 2016, le TASS a :

- Rectifié les points de retraite complémentaire pour toute la période sollicitée et

- Ordonné la révision du montant de la pension de retraite complémentaire.

La CIPAV estimant qu’elle n’avait pas à accorder tous ces points à l’assuré, a interjeté appel (a contesté) de cette décision.

La Cour d’appel confirme le jugement par un arrêt en date du 8 mars 2018. Elle constate que la CIPAV « réduit le montant des prestations qu’elle sert au titre de la retraite complémentaire, non pas sur le fondement légal ou règlementaire, mais pour pallier l’absence de compensation par l’État à hauteur des sommes qui seraient normalement dues aux auto-entrepreneurs à jour de leurs cotisations sociales. »


Elle souligne, par ailleurs, que la caisse établit un lien direct et impératif entre le montant des prestations qu’elle sert à ses micro-entrepreneurs et l’absence de compensation appropriés par l’État. Selon les juges de la Cour d’appel, la réglementation prévue par le Code de la Sécurité sociale à laquelle se réfère la CIPAV ne conduit pas à établir un lien. Ils ajoutent également que l’affilié n’a jamais eu une réduction de ses cotisations.


Pour la Cour d’appel, la CIPAV n’a pas attribué le bon nombre de points à l’assuré, malgré l’existence d’une réglementation spécifique en la matière.

La CIPAV introduit alors un pourvoi en cassation contre cet arrêt et la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 23 janvier dernier a confirmé l’arrêt d’appel. L’autoentrepreneur verra donc ses droits rétablis.

CIPAV – une caisse de retraite pas encore à niveau

Notons au passage que la Cour des comptes a déjà rendus des rapports peu favorables à la CIPAV. Dans l’un d’entre eux, rendu en 2017 sur la CIPAV, elle précise dans l’un des paragraphes qu’il y a « une absence anormale de rétablissement des auto-entrepreneurs dans leurs droits ». La cour des comptes « réitère sa recommandation de rétablir dans la plénitude de leurs droits les auto-entrepreneurs concernés entre 2009 et 2015, sur la base d’une cotisation minimale recalculée » (page 427 du rapport).


A la suite de cette décision importante pour les micro-entrepreneurs, la CIPAV a indiqué sur son site que « la portée de l’arrêt est limitée à la situation particulière du requérant » et « souligne ensuite l’effet modéré de l’arrêt sur la pension de l’intéressé, celle-ci ayant fait l’objet d’une revalorisation de l’ordre de 27 € en application de la décision de la cour d’appel ».

Elle rappelle enfin qu’elle « va immédiatement se rapprocher des services de l'Etat pour définir les actions à mettre en œuvre à la suite de cette décision et examiner les points de droit qui n’ont été tranchés par cette décision ».


Au regard des décisions rendus, la CIPAV pourra se retourner contre l’Etat et lui réclamer les sommes afférentes à ces cotisations.

Enfin, les assurés qui cotisent à la CIPAV pourraient à leur tour, s’ils s’estiment lésés dans leurs droits, entamer les recours les rétablissant dans leurs droits.

Les occasions chez Ere Conseils de travailler avec la CIPAV sur les droits des assurés, en matière d'affiliation ainsi qu'en matière d'intégration de droits, sont nombreuses.

Après vérification de la législation et la situation de nos clients, la CIPAV a intégré les droits de ces derniers.

En cas de doute ou d'interrogation sur votre situation, Ere Conseils peut vous renseigner et vous accompagner dans la reconnaissance et l'intégration de vos droits.

Notes:

Cour de cassation, arrêt rendu le 23 janvier 2020, pourvoi n° 18-15.542

Rapport de la Cour des comptes du 8 février 2017, Tome II - L’organisation, les missions, le suivi des recommandations


Adriana MERIAUD - Juriste

ame@ereconseils.com


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